Trump, son G7, son sommet coréen, sa menace pour la paix mondiale

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L’actualité européenne récente a été marquée par deux changements de régimes surprenant, l’un en Italie mettant au pouvoir populistes de droite et de gauche, et en Espagne un renversement du pouvoir par une majorité fragile de gauche, d’extrême gauche et de groupes indépendantistes. Des changements qui pourront peut-être avoir des conséquences importantes sur l’Europe, si ces deux gouvernements sont durables (ce dont on peut douter). Nous n’aborderons pas ces questions aujourd’hui puisqu’elles relèvent, pour l’instant, uniquement de politiques internes. Nous n’aborderons pas non plus le sort du bateau Aquarius, rempli de migrants, que le nouveau gouvernement italien très anti-immigration a refusé d’accueillir dans ses ports. L’Espagne s’est portée volontaire pour accueillir les réfugiés, mais notons le silence de la France qui se trouve à mi-chemin entre les deux pays. Une posture qui divise jusque dans les rangs de la majorité. Nous n’évoquerons pas non plus la bonne nouvelle d’un accord entre la Grèce et la Macédoine sur le nom officiel de cette dernière, puisqu’il a été rejeté par le président de la Macédoine, en désaccord avec son Premier Ministre.

Nous parlerons, en revanche, de l’actualité géopolitique brûlante, toujours plus proche de changer le monde tel qu’on le connaît. Nous nous pencherons donc sur le fiasco du G7 et la surprise du sommet Trump-Kim avant d’évoquer les tristes chiffres sur la paix mondiale. On finira avec deux vidéos, une sur ce qu’est cette « guerre économique » dont tout le monde parle, puis une vidéo sur l’histoire de l’empire du Japon, épisode fondamental de l’histoire de l’Asie. Bonne lecture!

Le G7, Trump et les autres
Les 8 et 9 juin derniers s’est tenu le G7, rassemblement des sept plus importantes puissances occidentales (anciennement « G8 », la Russie ayant été exclue en 2014 suite aux événements en Crimée). Les enjeux fondamentaux de ce sommet tournaient autour de la posture isolationniste voire belliqueuse de Donald Trump. Alors que les puissances présentes partagent comme objectif le maintien d’un système libéral et multilatéral, le Président américain s’illustre depuis plusieurs mois comme principal obstacle de ces objectifs, notamment en taxant les importations provenant de ses alliés historiques le Canada, le Mexique et l’Union Européenne. À l’issue du sommet, le Premier Ministre canadien Justin Trudeau qualifie à nouveau d’«insultants» les taxes de Trump à l’encontre de son pays. Donald Trump, qui l’apprend dans Air Force One quittant le Canada, décide de se retirer de l’accord de consensus signé par tous les participants à la fin du G7. Les accrochages continuent, comme à l’accoutumée, sur Twitter. Le fossé entre les États-Unis et le reste du monde occidental continue de se creuser. Le fait que Trump ait réclamé le retour de la Russie dans le sommet est également assez significatif de l’éloignement stratégique entre les US et l’UE.

Trump, Kim et leur accord commun
Le 12 juin, Donald Trump et Kim Jong-un se sont rencontrés à Singapour, et ont signé un document commun promettant une dénucléarisation complète de la péninsule coréenne en échange de garanties de sécurité pour le régime nord-coréen. Trump a par la suite annoncé l’arrêt des traditionnels exercices militaires à proximité de la Corée du Nord. La Corée du Sud, qui participe à ces exercices réguliers, est prise de court, n’ayant pas pris part aux négociations du sommet bilatéral. Mais c’est aussi le Pentagone qui est surpris par les promesses de Trump, qui semblent précipitées vis-à-vis d’un État extrêmement militarisé et menaçant. Ces exercices servent à avoir une réponse rapide et appropriée en cas d’attaque nord-coréenne, une éventualité qui peut toujours être d’actualité malgré la signature d’un accord (surtout lorsqu’on connaît la manie de Trump de revenir sur tous types de pactes). Aucune information n’est parvenue sur la contrepartie nord-coréenne à cette promesse de gel des exercices. Une rencontre historique qui laisse pantois les experts, surtout après la décision de Trump de revenir sur l’accord nucléaire iranien, un pacte de la même nature, si ce n’est plus sûr et durable. 

Il restera beaucoup à faire pour mener un véritable programme de dénucléarisation, qui lui-même implique de nouveaux problèmes comme la potentielle fuite des experts nucléaires à l’étranger, puis après cette dénucléarisation si elle est effective: quel projet d’unification des Corées? Comment promouvoir la démocratie dans un régime totalitaire? Comment aborder la question des prisonniers retenus dans des camps, dont on estime le nombre à 130 000? Celle des déserteurs nord-coréens? Le sommet est un pas dans la bonne direction qui n’assure pas encore des résultats positifs concrets. Ce qui reste sûr, c’est que la Corée du Nord a atteint un objectif recherché depuis des décennies: être mis sur un pied d’égalité diplomatique avec les États-Unis, tout en possédant l’arme nucléaire. 

Bonus: la zone démilitarisée à la frontière entre les deux Corées (la DMZ) étant un no man’s land depuis les années 1950, la nature y reprend ses droits, et la zone est devenue un sanctuaire pour de nombreuses espèces menacées. Plutôt qu’un « bénéfice de la guerre », c’est un signe des bienfaits de l’absence totale de présence humaine sur un territoire.

Photo historique de la rencontre entre Donald Trump et Kim Jong-un

La paix mondiale et sa fragilisation
Le « Institute for Economics & Peace » vient de sortir son rapport annuel sur l’état de la paix mondiale. En analysant la situation dans les différentes régions du monde, l’institut mesure un indice de paix globale. Pour la quatrième année consécutive, l’indice de paix mondiale est en baisse (-0.27% entre 2017 et 2018). Chiffre significatif: les réfugiés et déplacés internes (ceux qui ont quitté leur maison mais pas leur pays) représentent 68 millions de personnes, soit environ 1% de la population mondiale. 
Le rapport pointe évidemment du doigt la situation dramatique au Moyen-Orient, actuellement la plus grande menace à la paix mondiale, mais aussi les politiques américaines en termes d’armement nucléaire, de participation à des conflits étrangers, la vente d’armes, etc. La France est 61ème dans le classement des pays les plus pacifiques, sur 163. 

[VIDEO] La guerre commerciale 
Les médias parlent de plus en plus de risque de « guerre commerciale » (trade war) avec les multiples décisions de Donald Trump d’imposer des taxes douanières à de nombreux pays, y compris ses alliés. Mais qu’est ce que c’est une « guerre » commerciale? Vox nous donne les clés pour comprendre, avec une habile utilisation du monde de Game of Thrones et des exemples historiques. Le principe est simple: les États-Unis vendent certains produits, que la Chine vend elle aussi mais à prix bien plus bas. Pour contre-balancer, les États-Unis, importateurs de ces produits chinois, imposent une taxe sur l’entrée de ces produits étrangers sur le sol américain. En réponse, la Chine va taxer l’entrée de produits américains sur son territoire. Si l’escalade continue, on parle de guerre commerciale. Récemment Donald Trump a imposé des taxes sur l’acier (25%) et l’aluminium (10%) en provenance de l’Union Européenne, du Mexique et du Canada, trois alliés historiques qui devraient riposter bientôt

[VIDEO] L’empire du Japon, son développement, sa fin
La chaîne L’Histoire par les cartes nous propose une brève. mais détaillée, histoire de l’empire du Japon, régime colonial sanglant qui s’étend de 1868 à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Cet empire a été très central dans l’Histoire de l’Asie précédent 1945, notamment de par ses périodes d’occupation des pays voisins. Sa chute fut un bouleversement pour toute la région, et a pavé la voie à la Chine pour devenir la puissance qu’elle est aujourd’hui.

Jack Snyder, dans son excellent livre Myths of Empire, prend le Japon impérial comme un exemple d’empire toujours plus gourmand en territoires, envahissant pays après pays, ce qui l’amène à sa chute lorsqu’il devient incapable de soutenir une économie et une politique assez efficace pour maintenir un contrôle dans le vaste État. Le « mythe de l’empire », pour l’auteur. est de croire que plus un État est vaste, plus il sera puissant (une idée qui, selon l’auteur, est entretenue par les groupes sociaux qui y trouvent leur intérêt: les armées et le complexe militaro-industriel principalement). Dans les faits, son étude démontre que gagner du terrain peut avant tout fragiliser l’État impérial. On pourrait adapter cette idée à tous les empires aujourd’hui disparus, de l’empire romain à l’empire ottoman, en passant par l’empire colonial français.

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